Quand le télétravail est devenu la norme


GSoft, une compagnie montréalaise de l’industrie technologique, conçoit des logiciels qui visent à améliorer le monde du travail. Pas étonnant, donc, que l’entreprise se soit fortement questionnée à l’arrivée de la pandémie au printemps 2020. Comme bien des entreprises d’ici, le télétravail est arrivé très tôt chez eux, dès la mi-mars. Mais GSoft n’anticipe pas de retour au bureau, ou du moins, pas de manière obligatoire. Il y a quelques mois, l’entreprise qui venait pourtant d’investir plusieurs millions de dollars dans de nouveaux espaces de travail a pris la décision de devenir « remote first », permettant à ses 280 employés de choisir le lieu d’où ils souhaitent travailler à l’avenir. Et pour toujours.

Une nouvelle normalité qui a ses avantages

Véronique Lacoursière est conseillère de marque chez GSoft. Je lui ai demandé ce qu’elle ressentait face à la perspective de ne pas retourner travailler dans leurs bureaux de Pointe-Saint-Charles quotidiennement.

« Personnellement, je trouve ça vraiment avantageux. J’ai acheté une maison dans les Cantons-de-l’Est et je peux maintenant y vivre à temps plein. J’ai d’ailleurs plusieurs collègues qui sont partis de la ville comme moi. Je dirais que chez GSoft, environ une personne sur trois a déménagé en campagne, ou à tout le moins travaille d’un chalet en ce moment ».

La jeune professionnelle constate que travailler de chez elle lui permet aussi d’avoir un horaire plus flexible. Tellement, en fait, qu’elle a décidé de saisir l’occasion pour démarrer un projet personnel : l’ouverture d’un café dans le village de Knowlton, prévue pour le printemps 2021.

« Je ne suis pas gênée de dire que le nouveau modèle de GSoft m’a donné des ailes entrepreneuriales, parce qu’il me donne plus de temps. Je crois d’ailleurs sincèrement que la compagnie sera heureuse de me voir me lancer dans cette aventure! »

Pas que des bienfaits

Véronique m’assure toutefois que tout n’est pas toujours rose dans cette nouvelle réalité d’entreprise.

« Avant, je sous-estimais la valeur des contacts que j’avais avec mes collègues en personne  » , affirme celle qui travaille aujourd’hui seule chez elle et multiplie les réunions sur Zoom.

« On est une entreprise très collaborative, toujours dans le partage d’idées. Maintenant, c’est un peu moins facile. Et c’est surtout moins spontané. Avant, je croisais quelqu’un dans le café de l’entreprise et je m’informais de ses projets et de sa vie en même temps – même si on n’était pas de la même équipe. Ça nous permettait de briser nos silos. Aujourd’hui, on travaille avec notre équipe immédiate et évidemment, on ne se croise plus à l’improviste. »

Elle remarque aussi que la frontière entre sa vie personnelle et sa vie professionnelle est devenue poreuse.

« Dès que je prends mon ordinateur, j’ai maintenant davantage le réflexe de regarder mes courriels. Mon cerveau est toujours en mode boulot, on dirait. Je prends aussi moins de pauses qu’avant. Dans le fond, je travaille plus, tout simplement. »

Tisser des liens à travers l’écran

Même si Véronique est heureuse de sa nouvelle normalité, elle reconnaît que certains aspects de la vie d’avant lui manquent.

« On dirait que je vis dans un jeu vidéo depuis six mois », dit-elle en riant. « Vous pourriez tous être faux en fait! Je ne vois les gens qu’à travers un écran. »

C’est drôle et c’est triste à la fois, me semble-t-il. Comme quoi le contact humain finit par nous manquer à tous, même quand la merveilleuse liberté de travailler n’importe où nous est donnée.